Chasse et réjouissance, de souvenir d’enfance à lien vital actuel

Ce matin je sais que je dois accompagner mon père en voiture, qui veut s’assurer que ses différents oiseaux animés dans le rayon autour des terres de chasse y sont toujours. Il y a parfois des besoins de libérer un grand nombre de ces oiseaux tels que des cailles ou des faisans pour assurer leur pérennité dans les bois. Cette fois-ci, c’est en tenant compte des bêtes déjà tuées qui faisandent et seront bientôt utilisées pour faire plus d’un festin.

   Le gibier a été vidé. C’est ce que que mon père cherchait à cuire chez ses amis pour offrir un délicieux repas destiné à sa famille bien agitée.

Émilie Desharnais/

Le soleil se réveille en douceur. J’arrive à ma fenêtre pour bien respirer et regarde les oiseaux. Ils sont rassemblés sur le toit pour former leur plaisir. Bien étendus et placés dans un coin, prêts à filer vers le ciel. Ce sont ces mêmes oiseaux qui feront partie du cycle de la chasse avec les chats, les renards, et mon père et ses amis.

Les oiseaux sont joyeux mais en même temps, toujours anxieux, à l’affût. La fraîcheur du matin s’élargit, et le vent qui frappait ailleurs épargnait les oiseaux attirés ensemble, près les uns des autres.

Ça y est, fenêtre grande ouverte, sans oiseaux ni vent, je m’agite à m’habiller rapidement pour rejoindre mon père, très décidé à prendre sa voiture pour m’emporter vers les terres de chasse et leur abri.

 

Aujourd’hui plus tard en 2023 je vois certaines anecdotes de chasse à la télévision sur une nouvelle chaîne appelée Seasons. Une chaîne spécialisée sur la chasse. Elle me semblait bien ennuyante au début, puis ensuite, m’a fait réfléchir à cette partie de chasse avec mon père, étant toute petite. Notre périple pourrait y figurer.

 

On y parle surtout de chasse en France mais souvent des reportages sur les terres giboyeuses du Québec s’y retrouvent. Ça tombe bien car ma partie de chasse en était une où l’on recherchait des perdrix.

 

En voiture avec mon père nous roulons a toute allure vers les collines. Mon père, chauffeur enthousiaste, prenait tout en note sur ses voyages dans un petit calepin, et prenait plaisir a sillonner les routes de campagnes, pour aller vers cette terre où il y dénichera plusieurs délicieux oiseaux.

 

Plutôt que de parler de ces pauvres bêtes comme de la simple nourriture, mon père et ses amis ont toujours fait attention à bien entretenir les populations de gibier dans ses lieux favoris de chasse, que ce soit pour le lapin, le cerf ou la perdrix. « Il faut qu’il y ait de tout, mais dans la mesure idéale, pour que les forêts soient giboyeuses. », m’a-t-il expliqué en conduisant vers le lieu mystérieux.

 

Aujourd’hui plusieurs entretiennent des vieux clichés sur les chasseurs, entretenus par les sketch humoristiques sur la galinette cendrée et compagnie. Tout ceci est bien loin de la réalité, lorsqu’on a vécu, étant petite, la grande chasse avec les amis de son père.

 

« Pourquoi est-ce que nous n’allons pas au marché chercher du canard? C’est plus facile, Papa! »

« Mais non! Aller au marché c’est très facile, mais ce n’est pas la même chose! » m’a répondu mon père. « La chasse est spéciale. C’est un lien qui nous unit à la terre. Il s’agit d’une question de faire les choses nous-mêmes. Nous rappeler que la nature ce n’est pas que des beaux paysages, c’est la survie, en fin de compte. Un lien vital nous unit au fond du bois et aux perdrix qui y roucoulent»

Bien perplexe devant ces paroles que je ne comprends qu’à peine, nous sommes arrivés, les hommes se préparent en file à aller chercher leurs chers oiseaux dodus. Le matin se réveille encore, ils montent dans la colline à la recherche de l’objet de cette chasse. Ils font très attention, ils ont des instructions, seulement tant d’animaux, tirer dans la bonne direction. Loin du cliché de chasseurs ignares, mon père rejoint les rangs, et part guetter les pistes de chasse, accompagné d’un compagnon. Il faut faire très attention  : l’an passé, un homme fût blessé lorsqu’un malheureux à tiré dans la direction opposée à la battue prévue. Ce n’est pas une partie de chasse, c’est une vraie embuscade forestière calculée.

Cela fait si longtemps que la chasse fait partie de la vie dans la nature, que les loups et les corbeaux savent reconnaître un fusil à la main d’une personne. Aujourd’hui en 2023, je suis bien loin des boisés de mon enfance chasseresse. À Montréal, dans un appartement, bien que le Mont-Royal ait des faisans, il y a déjà plus de 50 ans que l’on n’y chasse plus. Goûter au gibier de potence est très difficile.

Loin des landes de mon enfance, de mon père et de ses parents, dans ce pays de pingouins du Québec on pratique pourtant la chasse depuis toujours.

La chasse au Québec est pourtant une chasse gardée. Nul ne va simplement à la chasse dans la forêt sans être avisé. Si tout le monde partait chasser à qui mieux-mieux, nos terres seraient vite dépeuplées et en déséquilibre. Il faut avoir un permis avant de chasser. Seulement certaines populations peuvent être chassées, à des temps fixes, et en nombres très restreints, si bien qu’à chaque année, les permis de chasse à l’orignal sont octroyés par un système de loto. Les rares chasseurs sont donc très chanceux et plutôt téméraires de rester plusieurs jours en silence sans bouger à la recherche de la proie tant désirée.

 

Pour la petite montréalaise que je suis devenue, il y a peu de chance que je puisse goûter à une oie sauvage. Malgré cela, en Beauce, parfois, des chaseurs tirent un lièvre, et ont une permission légale occasionnelle de le vendre en marché. Il y a aussi un programme  où les Inuits du Nunavik ont pu revendre une petite partie de leur chasse au caribou dans des villes du sud du Québec pour faire plusieurs différents produits. À part ces cas, c’est impossible de goûter, en temps normal, à du gibier sauvage sans connaître un ou une chasseur(euse).

Le problème dans la chasse, ce n’est pas les vrais chasseurs, c’est les braconniers. Comme le disait un certain Félix Leclerc « Vandales et braconniers sont des profanateurs, et ne méritent pas d’avance!  »

 

Comment alors, avoir le privilège de goûter à ce lien vital qui nous unit à la terre? Aucun restaurant ou supermarché (sauf exception) n’a le droit de vendre du gibier sauvage. La réponse  : les Premières Nations. Grace aux Premières Nations et aux Inuits, les non-autochtones peuvent avoir cette chance. Avec raison, les Attikamekws, Innus, Hurons et autres Cris et compagnie, ont, avec raison (c’est la moindre des choses) le droit de chasser sans à avoir à demander un permis au gouvernement. Grâce à cette juste disposition, combiné au miracle de la gastronomie, la petite fille habitant maintenant Montréal est invitée à table.

 

Plusieurs communautés autochtones offrent parfois différents gibiers authentiques dans certains restaurants. Pour moi, c’est un peu loin. Mais puisque j’aime bien la ville de Québec, j’ai eu la chance de visiter Wendake, terre natale des Hurons-Wendat. Cette comunauté est très accessible puisqu’elle est en fait adjacente à la ville de Québec. Là, vous pourrez gouter du véritable gibier grâce à leur hospitalité, au fameux restaurant Le Sagamité. Le restaurant de l’hôtel des Premières-Nations, à Québec, fait aussi des délicieux plats audacieux avec les merveilles des forêts présentes et des terroirs environnants.

 

Le soir venu, mon père est bien au chaud, déchaussé de ses grandes bottes, dans sa chemise de chasse, devant le feu du foyer. La chasse a été bonne, il faut vider les délicieux oiseaux et se préparer à les faire rôtir. Je ne sais plus ce qui a été plus mémorable, nettoyer et cuisiner les oiseaux et les plats du repas en famille, ou le festin lui-même, dégusté avec frères et sœur agités. La chasse a été bonne. Bien repus en famille, au loin, j’entend la mélodie nocturne des oiseaux blottis ensemble sur le toît.

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JFr
JFr
8 mois il y a

Franchement c’est assez évocateur comme récit.

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